Les arcades

Entourant le jardin, les arcades sont souvent traversées par les élèves, qui change de salle de cours ou qui vont vers leur chambre.

Il la senti avant de la voir. Son parfum, il l'aurait reconnu à mille lieues de distance. Desserrant les mâchoires, il laissa son bras et ses épaules retomber en soupirant. Il ne voulait pas paraitre en colère devant elle. Il ne voulait pas lui laisser voir ses faiblesses qui, parfois, le prenait par surprise. Caressant son tatouage, il tourna la tête vers elle et décida de ne pas bouger. Si elle voulait lui parler, il savait qu'elle viendrait d'elle même.
Et de toute évidence, c'est ce dont elle avait envie car elle vint vers lui en souriant. Lui ne sourit pas. Il y avait longtemps qu'il n'avait plus de raison de sourire.

_'lut... marmonna t-il en enfonçant ses mains dans les poches de son uniforme.

_Tiens, des reproches, ça faisait longtemps...

Il ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. Ne pouvait-elle pas comprendre que la guilde commençait à peine à lui confier du travail et qu'il ne devait surtout pas les décevoir pour espérer pouvoir un jour obtenir de vraies missions dignes de son ambition ? Non, elle ne pouvait pas le savoir, et c'était tant mieux. Il ne voulait pas la mêler à toutes ces histoires. Il se força à la regarder en face. Il détestait cela. Après tout, on disait de son regard glacé qu'il mettait mal à l'aise. Mais Yuuki le connaissait bien.

_Que veux tu que je te dise ? Même si tu savais ce que j'ai fait ces trois jours, le fait restera le même: je n'étais pas là. Je te demande pardon, c'est tout ce que je peux faire.

"_Tiens, des reproches, ça faisait longtemps..."

Yuuki se retint de lui dire que les reproches qu'elle lui faisait était à cause de son absence de longue durée ! Elle soupira intérieurement et arrêta de lui tapoter l'épaule. Cela ne l'impressionnait guère et, cela ne servait à trois fois rien pour ne pas dire à rien du tout !

"_Que veux tu que je te dise ? Même si tu savais ce que j'ai fait ces trois jours, le fait restera le même: je n'étais pas là. Je te demande pardon, c'est tout ce que je peux faire."

La réponse était évidente ! Zero n'était du genre à tout dire, d'ailleurs, il ne disait presque rien !! Yuuki lui répondit :

-Tout se que j'espère c'est que tu seras là ce soir !! La Saint - Valentin approche et les élèves de la Day Class sont de plus en plus difficile à tenir !!

La St Valentin. Comment avait-il pu l'oublier ? Bien sûr que ces filles sortaient faire leurs courses pour cette occasion...comment ? Comment cela avait-il pu sortir de son esprit ? Quand à Yuuki, que lui répondre ? Oui, il serait là ce soir, et le serait sans doute demain également, mais pour la suite, il l'ignorait. L'idée de faire un cadeau à quelqu'un n'effleura même pas son esprit.

_Oui, je t'aiderai ce soir. C'est mon boulot après tout.

Il commença à tripoter nerveusement sa veste. Se retrouver à nouveau face aux vampires de l'école le mettait mal à l'aise, les derniers qu'il avait rencontrés ces derniers jours ayant été réduits à des tas de cendres qu'il s'était fait un plaisir malsain à jeter au milieu des ordures. Il rêvait d'en faire de même pour ces nobliaux hypocrites qui prônaient la paix alors qu'ils n'hésitait pas à aller satisfaire leurs bas instincts sur les premiers humains venus. Comme les règles de l'académie devient leur paraitre strictes à les empêcher de se rassasier quand bon leur semblait !
Alors qu'il ruminait ses sombres pensées, une question qu'il jugea particulièrement idiote et superficielle vint trotter dans son esprit, chassant toutes les autres pour quelques instants:

_Tu vas faire un cadeau à quelqu'un pour la Saint-Valentin ?

"_Tu vas faire un cadeau à quelqu'un pour la Saint-Valentin ?"

Yuuki rougit un peu quand elle entendit cette phrase. Elle avait en effet, prévu d'offrir un cadeau pour Kaname. Mais, connaissant la haine qu'éprouvait Zero envers les vampires, elle préféra ne rien dire sur ça, même si elle savait que cela ne savait à rien, car Zero arrivait toujours à découvrir ce qu'elle cachait !

-Oui ! Comme tous les ans, à toi et au directeur !

Elle lui fit un clin d'œil en souriant.

-Et toi ?

Question complètement stupide. Zero n'avait jamais offert quoique ce soit à la Saint - Valentin !

Mais oui bien sûr petite cachottière. Le directeurs et moi sommes tous deux de belles raisons pour rougir n'est ce pas ? Depuis le temps qu'il la savait entichée de Kaname, depuis des années en fait, il était surpris qu'elle ne lui ait pas fait plus de cadeaux avant. Il aurait bien aimé qu'elle soit sincère avec lui mais après tout, pouvait-il exiger cela d'elle alors que lui même ne se confiait jamais à elle ?
De nouveau, il laissa échapper un soupir et s'adossa à ne arcade, se laissant tomber contre la colonne de pierre avec un bruit sourd. Qu'allait-elle offrir ce présomptueux qui ne méritait, en toute chose, qu'une balle dans la tête ? C'était incroyable ce que cette question le tracassait. Après tout, que cela pouvait-il bien lui faire ? Ce n'était pas son problème. Et en même temps, il ne voulait pas voir Yuuki comme toutes ces petites naïves qui s'imaginent pouvoir séduire le chef de la night class. Il ne voulait pas que Kuran puisse lui faire du mal en jouant avec ses sentiments. Mas pourquoi diable l'aimait-elle, lui ? N'y avait-il donc aucun autre homme qui lui plaise et avec qui elle aurait pu être heureuse ? Mince alors ! Pourquoi lui ?! Pourquoi cet enfoiré qu'il haïssait....?

_Oui bien sûr, suis je bête.

Il mit quelques instants à comprendre le sens de sa question. Mais que s'imaginait-elle ? Il n'avait jamais songé à faire un présent à qui que ce soit.

_Non mais sérieusement, tu me vois me casser la tête pour une gamine de la classe ? A part la binoclare, aucune fille ne me regarde d'ailleurs, à part quand je les renvois derrière les barrières bien sûr. Tu t'attendais à quoi avec une question pareille ?

Il ne réfléchit même pas et s'en voulu de ne pas s'être contenu.

_Quoi ?! Aimer une fille ? Moi ?

Mais...Quoi ? Pfff ! Alors là, c'était la meilleure. Mais qui donc pourrait-il aimer ? Il ne voyait personne de son plein gré. Les filles de la classe, il était bien obligé de les côtoyer pour les cours, quand aux autres qu'il ne voyait que le soir à l'apparition de la night class, rien que le fait qu'elles soient là pour admirer des vampires les rendait méprisables à ses yeux. A part Yuuki avec qui il passait ses journées et cohabitait en permanence, aucune n'avait autant pénétré son espace vital.

_Je ne considère pas le fait d'aimer comme une honte à proprement parlé mais comme une faiblesse. Donc oui, pour certain, les faiblesses sont des hontes. Quivoudrait se laisser dicter ses actes par un sentiment incontrôlable qui l'accroche à quelqu'un ?

Il ne pu s'empêcher de rajouter quelques mots qu'il regretta aussitôt et se promis de ne plus jamais parler de la saint-Valentin avec Yuuki.

_Quelqu'un qui ne le mérite pas.

Il sut qu'elle pleurait au moment même où elle détourna les yeux. Elle qui lui faisait face même lorsqu'elle se savait en tort, c'était la seule raison pour qu'elle détourne les yeux. Non, Kaname ne méritait pas son amour. Mais lui ? Lui aussi ne savait lui faire que du mal, alors était-il plus digne que ce sale sang pur de l'affection que lui portait la jeune fille ? Non, peut-être même était-ce un hasard injuste qui l'avait mit dans ce rôle de grand frère alors que n'importe qui l'eut mieux exercé à sa place.
Quand il la vit tourner les talons à vive allure, il voulu la retenir mais elle s'était déjà éloignée et sa main ne fit qu'effleurer sa manche. Sa réponse fut aussi lointaine qu'elle.
Qu'avait-il dit ? Il voulait la préserver des souffrances dues à une affection à sens unique et en fin de compte, c'était lui qui la rendait la plus malheureuse. Il passa la main qu'il avait tendue vers elle sur son visage, comme pour s'assurer que ce visage de marbre était bien le sien.
A cet instant, il aurait voulu ne s'être jamais tenu sous ses arcades et supprimer ainsi cet épisode où il s'était encore illustré par son incapacité à la comprendre. S'élançant à sa suite, il la rejoignit alors qu'elle atteignait la porte de la salle où allait démarrer leur prochain cours et tendit le bras pour l'ouvrir devant elle, profitant de cette occasion pour lui caresser imperceptiblement la joue.

_J'ai une deuxième raison de m'excuser aujourd'hui, j'espère que tu me pardonneras également pour cette fois ci.

Yuuki s'arrêta devant la porte et essuya avec la paume de sa main, ses yeux. Elle prit une grande respiration en essayant de chasser cette phrase qui hantait désormais son esprit. La jeune fille allait ouvrir la porte quand elle vit Zero. Puis, elle sentit comme quelque chose sur sa joue. La lui caressait-il ? Si c'était le cas, ce geste était parfaitement imperceptible.

"_J'ai une deuxième raison de m'excuser aujourd'hui, j'espère que tu me pardonneras également pour cette fois ci."

Yuuki le regarda un moment avant de reprendre son sourire habituel et de répondre :

-C'est tout oublié !!

Elle détestait mentir, surtout aux êtres qu'elle aimait mais, elle ne voulait pas montrer sa tristesse ainsi que sa douleur.

Se fut à son tour de lui faire un sourire. Un peu forcé il est vrai, et plutôt discret, mais bon, il dû faire un gros effort pour étirer ses lèvres. A croire que c'est une action qui devenait douloureuse pour les gens qui ne voulait montrer d'eux qu'un masque impénétrable. Comme si l'immobilité qu'il imposait à ses traits avait finit par devenir une seconde nature à son visage et par le geler dans sa neutralité. Mais enfin, on pouvait le dire: Zero sourit. Un peu.
De sa main libre, il attrapa une mèche de cheveux de Yuuki et joua avec. Sa bouche avait beau sourire, ses yeux était tristes et fatigués comme ceux d'un vieillard courbé sous le poids des années et des souffrances.

_Cela m'étonnerais que tu ais déjà oublié...tu as bonne mémoire pour me ressortir tout ce que je te dis alors pour quelque chose d'aussi cruel...Tes sentiments n'appartiennent qu'à toi. Je ne t'en voudrais jamais d'aimer qui que ce soit. Même lui...même Kaname Kuran.

Il la poussa doucement à l'intérieur et referma la porte derrière lui en jetant un dernier regard à la cour, ses yeux soudain haineux à l'évocation d'un nom précis dirigés vers la poubelle du fond.